Gestion des déchets : les effets pervers
Courant décembre 2010, la plupart des foyers saintois - pas tous - recevaient un dépliant intitulé : « Demain, Terre-de-Haut poubelle ou plus belle », annonçant la fermeture de la décharge du Chameau et expliquant, images à l’appui, les nouvelles dispositions concernant le tri, le ramassage et le traitement des déchets ménagers à compter du 1er janvier 2011. Il était temps ! Le Chameau enfin ne fumera plus !
Le site du chameau bientôt réhabilité ?
Initiative louable donc, bien que forcée et tardive, de la municipalité qui recommande à tout un chacun de « conserver chez soi ses ordures, jusqu’au prochain jour de collecte », laquelle devra se faire désormais les lundi, mercredi et vendredi, soit trois fois par semaine au lieu de tous les jours, ce qui, précise la plaquette, est « moins qu’avant mais encore plus qu’ailleurs. » Slogan racoleur et pas toujours ni totalement vrai partout, mais passons.
Après un peu plus d’un mois de l’entrée en application de ces nouvelles et indispensables mesures, il est légitime, selon nous, de voir comment les Saintoisont réagi, habitués comme ils l’étaient depuis des décennies à la collecte journalière indifférenciée des déchets, mais aussi d’observer quels changements se sont opérés dans la propreté et la salubrité de la commune.
Globalement, on peut dire que le maire a eu raison, voilà quelques jours, sur RCI, de féliciter la population pour son étonnante discipline en ce domaine. Car la quasi-totalité des foyers, il faut le reconnaître, respecte ces dispositions pour le plus grand bien de notre environnement, même si, en contrepartie, la taxe de ramassage des ordures ménagères, pour ceux qui la payent, ne cesse injustement d’augmenter.
Le problème, car il y en a un d’importance, c’est que Terre-de-Haut, jusqu’à nouvel ordre, est une île touristique dotée de commerces, de bars, de restaurants, d’hôtels et d’une rade magnifique, recevant à certaines époques, un nombre non négligeable de voiliers et autres yachts de luxe ou pas auxquels il est interdit heureusement de jeter leurs déchets à la mer.
Le résultat était prévisible : comme il faut bien que les acteurs du tourisme tout autant que les visiteurs de passage, à terre ou sur l’eau, se débarrassent au jour le jour de la masse toujours plus imposante de leurs déchets organiques et autres résidus encombrants issus de leurs activités professionnelles ou de plaisance, les quelques grands bacs à ordures, encore installés ici ou là à travers le bourg, sont littéralement pris d’assaut. Et comme la contenance de ces bacs est limitée, ils ne tardent pas à déborder et leurs abords, surtout le week-end, servent fatalement de dépotoir. Dépotoir le plus souvent nauséabond qui fait la part belle aux rats, vermines et autres chiens errants, ternissant du même coup l’image d’accueil, de propreté et de salubrité de la commune et réduisant à néant les efforts de la population
On voit bien là les limites d’une réglementation aussi nécessaire, judicieuse et coûteuse qu’elle soit, en ce domaine si délicat de la gestion des déchets dans une île comme la nôtre. Si bien que les questions qui se posent désormais à la municipalité sont multiples et urgentes :
- Comment faire en sorte que commerçants, tenanciers, restaurateurs et autres professionnels du tourisme, sans pénalisation ni restriction de leurs activités, respectent au même titre que les particuliers la réglementation en vigueur ?
- Quelles structures et modalités envisager pour éviter que les plaisanciers, qui profitent, sans contrepartie financière connue, des services de propreté de la collectivité, entreposent n’importe où leurs poubelles à chacune de leur descente à terre ?
- Comment, et sur quel budget réhabiliter intelligemment le site si longtemps dénaturé du Chameau ? Sujet, semble-t-il, à juste raison, à l’ordre du jour.
- Pourquoi enfin, dans un souci évident de stricte justice, de solidarité et d’équilibre budgétaire, ne pas répartir sur la totalité de la population concernée les frais générés par les nouvelles mesures de tri, de collecte et de transport des déchets, sachant que, par clientélisme électoral, seul, à ce jour, un petit nombre de foyers est assujetti aux taxes foncières et d’habitation, donc à celle toujours croissante du ramassage et du traitement des ordures ?...
Voilà entre autres, de quoi alimenter pour un temps de sérieux débats au sein du conseil municipal.
Par la force des choses, (directives européennes notamment et injonction du Préfet), un premier pas important et salutaire a été fait. Les Saintois attendent maintenant des réponses cohérentes aux questions en suspens et des solutions concrètes aux problèmes ci-dessus évoqués : effets pervers naturels et logiques d’une politique tardive et inachevée de la gestion des déchets, restée trop longtemps secondaire, pour ne pas dire totalement inexistante, à Terre-de-Haut.